Souven-être (2)*

pédalo2

12 juillet.

Privilège ou malédiction de l’âge ? État de fait, en tout cas.

Depuis 4 heures ma voiture file pour, là, en venir à passer – une fois de plus – à cet endroit qui m’attend. Cette fois, la mélancolie m’assaille soudain lorsque – après ce virage à droite – tout à coup il apparaît. D’ordinaire elle surgit bien plus tôt, diffuse, tandis que peu à peu je m’en approche. Aujourd’hui, après le répit accordé, c’est plus brutal. je l’avais presque oubliée : elle m’a surpris.

Le lac de Gérardmer, que je longe ! Cette « rencontre »  bi-annuelle, je l’ai depuis quelque 20 ans, été après été. Les premières années, c’était une simple nostalgie : celle que l’on éprouve, la cinquantaine passée, en retournant sur les lieux marquants de l’adolescence.

L’année de mes 15 ans, j’avais effectué un camp scout dans les Vosges, l’un de mes premiers grands voyages, en fait. Ils étaient encore rares au début des années 60.

À l’occasion d’une sortie, nous étions allés au bord de ce lac et – le souvenir me hante – nous avions fait une balade en pédalo, partant de la base sise juste devant le grand hôtel, Beau Rivage, je crois. J’étais sur l’embarcation avec mon camarade d’enfance, William.

Depuis, à chaque fois que je revois cette place, je ne puis que repenser à cet autrefois : la joie d’alors, bruyante, les rires, les interpellations que nous nous jetions de pédalo à pédalo, le soleil de l’été, l’insouciance des jeunes années…

Plus de 50 ans ont passé et les hasards de la vie m’amènent à passer par là tous les 12 mois environ, depuis deux décennies. J’y ai ce rendez-vous avec ma mémoire, cette entrevue virtuelle avec toi.

Mais depuis 5 ans, c’est différent. La simple nostalgie de la jeunesse s’est muée en autre chose  : un approfondissement de l’être, une sorte de gravité fataliste, résignée, une tristesse contenue.

Car à cette époque, Willy, sans aucun signe prémonitoire pour nous, tu t’es ôté la vie.

Et dès lors, j’ai été comme amputé d’une part de moi-même. Les autres, ceux qui ont traversé notre existence, nous constitueraient-ils, eux aussi, pour partie ? Je ne sais. Je sais seulement qu’aujourd’hui, alors que seul dans ma voiture je visualise à nouveau ce lieu chéri et maudit à la fois, j’ai encore murmuré ton nom, ami, t’ai adressé quelques paroles en levant mon bras droit, en guise de salut.

Tu n’as pas disparu, Willy ; tu vis en moi !

(2)* parce que j’ai écrit un poème au même titre, visible sur atramenta.net)


Et toujours en promo (jusqu’au 31 août 2016), à 2,99, mon récit au format numérique sur ces 60 années d’amitié : « Chemins croisés », ed. de la Rémanence [format papier 12 euros] ICI

 

 

2 réflexions sur “Souven-être (2)*

  1. Que tout ceci est bien observé, mon cher Claude !
    J’ai été moi aussi très marqué par ces camps scouts, où j’ai noué des amitiés qui perdurent.
    Comme tu l’observes justement, ceux qui ont partagé notre vie nous ont « façonnés » à leur façon !

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